Le jour par jour

1748   30 août   

Jacques-Louis David, peintre français.

Jacques-Louis David, né le 30 août 1748 à Paris et mort le 29 décembre 1825 à Bruxelles, est un peintre français considéré comme le chef de file de l’École néoclassique dont il incarne le style (la manière de peindre) et l’option intellectuelle (régénérer les arts en développant une peinture que les classiques Grecs et Romains, selon la propre formule de David, auraient sans hésiter pu prendre pour la leur, ce qui revenait à reprendre les choses là où Nicolas Poussin et le «Grand Siècle» les avaient laissées).

Il fut l’un des artistes les plus admirés, enviés et honnis de son temps, pour ses engagements politiques autant que pour ses choix esthétiques. Par le passé, rarement un artiste aura épousé à ce point les grandes causes de son temps en mêlant intîmement art et politique.

David vota la mort du roi Louis XVI, puis se fit le chantre de Napoléon. Il opéra une rupture avec le style galant et libertin de la peinture du XVIIIe siècle mais ses sujets inspirés de l’Antiquité, pour différents qu’ils se voudront par leur style du rococo, n’en finiront pas moins par adopter aussi le thème de la mythologie. Il revendique l’héritage du classicisme de Nicolas Poussin, mais s’inspire aussi du baroque de Rubens. Il fut un maître pour deux générations d’artistes au moins, venus de toute l’Europe pour se former dans son atelier qui à son apogée, comptait plusieurs dizaines d’élèves

Biographie

Enfance

Né à Paris, Quai de la Mégisserie, dans une famille de la petite bourgeoisie, son père, Louis-Maurice David, est marchand-mercier de fers en gros à Paris. Pour s’élever socialement, il achète une charge de Commis aux aydes (équivalent de receveur des impôts) à Beaumont-en-Auge dans le Calvados. Sa mère Marie-Geneviève, née Buron, appartient à une famille de maître-maçon son frère François Buron est architecte des Eaux et Forêts et son beau-frère Jacques-François Desmaisons est architecte, son second beau-frère Marc Desistaux est maître charpentier. Elle est aussi liée, du coté maternel à la famille du peintre François Boucher. Le jeune David est mis en pension au couvent de Picpus jusqu’au 2 décembre 1757 date à laquelle son père meurt à trente-cinq ans. D’après les sources anciennes la cause du décès serait liée à un duel à l’épée. David avait juste neuf ans, et sa mère fait appel à son frère

François Buron pour s’occuper de l’éducation de son fils. Après l’avoir fait suivre des cours chez un répétiteur, elle le fait entrer au collège des Quatre-Nations dans la classe de rhétorique. A partir de ce moment sa mère se retire à Évreux et laisse l’entière éducation de David à la charge de son oncle. Doué pour le dessin, sa famille envisage d’abord à lui faire embrasser la carrière d’architecte comme ses deux oncles.

 

Sa formation

Après avoir appris le dessin à l’académie Saint-Luc, François Boucher, premier peintre du roi, est d’abord approché pour le former. Trop âgé pour enseigner, il estime que le jeune David pourrait tirer un meilleur bénéfice de l’apprentissage des nouvelles tendances néoclassiques que peut lui apporter

Joseph-Marie Vien, artiste dont le style antiquisant n’est pas encore exempt d’inspirations galantes.

En 1766, sous l’égide de Vien mais encore influencé par l’esthétique de Boucher, David commence à étudier l’art à l’Académie royale dont l’enseignement devait permettre aux élèves de concourir pour le prix de Rome. Son parrain Jean-Michel Sedaine, secrétaire de l’Académie d’architecture et auteur de théâtre, devient son protecteur et s’occupe de parfaire son éducation intellectuelle en le faisant rencontrer quelques unes des personnalités culturelles de l’époque. C’est, peut être, lors de ces années d’apprentissage qu’il développe une tumeur dans la joue gauche consécutive d’ un combat à l’épée avec l’un de ses condisciple d’atelier. Dans ses autoportraits David dissimulait ce défaut physique par une ombre, mais d’autres artistes comme Jérome-Martin Langlois et François Rude montrent sans complaisance la déformation causé par le kyste.

En 1769 la troisième médaille qu’il reçoit au «Prix de quartier» lui ouvre la voie vers le concours du grand prix de Rome. En 1771, il obtient le second prix avec son œuvre, le Combat de Minerve contre Mars dans un style hérité du Rococo et d’une composition jugée faible, le lauréat était

Joseph-Benoît Suvée.

En 1772, il manque de nouveau le premier prix avec Diane et Apollon perçant de leurs flèches les enfants de Niobée le grand prix étant décerné ex-æquo à Pierre-Charles Jombert et Gabriel Lemonnier à la suite d’un vote arrangé du jury . Après cet échec qu’il vécut comme une injustice, il résout de se laisser mourir de faim, mais après deux jours l’un des jurés Gabriel-François Doyen le convainc d’abandonner sa tentative de suicide. En 1773, c’est encore un échec avec La mort de Sénèque sujet inspiré de Tacite, le lauréat fut

Pierre Peyron dont le style neo classique était récompensé pour sa nouveauté, la composition de David étant jugée trop théâtrale. Ne pouvant recevoir deux fois le second prix, en guise de consolation il reçoit le prix de l’ Étude des têtes et de l’expression pour son pastel intitulé La douleur.

Ces échecs successifs auront une incidence sur l’opinion de David contre l’institution académique et furent en partie à l’origine d’une hostilité qui aboutit en 1793 à la loi qu’il fait voter pour la suppression des académies

A la fin de l’année 1773, Marie-Madeleine Guimard première danseuse de l’Opéra, charge David de reprendre la décoration de son hôtel particulier transformé en théâtre privé, que Fragonard avait laissé inachevé à la suite de mésententes .

David pensionnaire de l’Académie à Rome

En 1774, il gagne finalement, après quatre tentatives, le premier Prix de Rome qui lui permet de séjourner pendant quatre ans au Palais Mancini alors résidence de l’Académie de France à Rome. L’œuvre présentée Érasistrate découvrant la cause de la maladie d’Antiochius dans son amour pour Stratonice (École nationale supérieure des Beaux-Arts, Paris) est conforme au nouveau canon de la composition dramatique. Érasistrate, le médecin reste serein alors même qu’il découvre la cause réelle de la maladie du roi Séleucide, se languissant d’une passion inavouable pour sa séduisante belle-mère Stratonice.

Vers le 2 octobre 1775, David, accompagne son maître Joseph-Marie Vien, qui vient d’être nommé directeur de l’académie de France à Rome, et deux autres lauréats, le premier prix de sculpture en 1774, Pierre Labussière et Jean Bonvoisin second prix de peinture en 1775. Lors de son périple il s’enthousiasme pour les peintures de la Renaissance italienne qu’il voit à Parme, Bologne et Florence. La première année de son séjour à Rome, David se conforme au conseil de son maître en se consacrant essentiellement à la pratique du dessin. Il étudie attentivement les Antiques, faisant des centaines de croquis de monuments, de statues et de bas-reliefs. L’ensemble de ses études composent cinq volumineux recueils in-folio. Il réalise en 1776 un grand dessin, Les combats de Diomède (Vienne Graphische Sammlung Albertina) qui représente un de ses premiers essais dans le genre historique, essai qu’il concrétise deux ans plus tard avec Les funérailles de Patrocle (National gallery of Ireland, Dublin) une étude de grandes dimensions peinte à l’huile, destinée à la commission de l’Académie des beaux-arts qui était chargée d’évaluer les envois des pensionnaires de Rome. Celle ci encouragea le talent de David, mais souligna des faiblesses dans le rendu de l’espace, l’obscurité générale de la scène et le traitement de la perspective. Il peint aussi plusieurs tableaux dans un style emprunté au Caravagisme: deux académies d’homme, l’une intitulé Hector (1778) et la seconde dite Patrocle (1780), inspirée du marbre, Galate mourant du musée du Capitole, un Saint Jérôme une Tête de philosophe et une copie de la Cène du Valentin.

De juillet à août 1779, David se rend à Naples en compagnie du sculpteur François Marie Suzanne. Ce séjour où il visite les ruines d’Herculanum et de Pompéi est à l’origine de sa conversion définitive au néoclassicisme. Le peintre dira plus tard « Il me sembla qu’on venait de me faire l’opération de la cataracte[…]je compris que je ne pouvais améliorer ma manière dont le principe était faux, et qu’il fallait divorcer avec tout ce que j’avais cru d’abord être le beau et le vrai ». On considère que l’influence de l’amateur d’antiquité Antoine Quatremère de Quincy adepte des idées de Winckelmann et Lessing, et dont il fait la connaissance à Naples, n’en fut pas étrangère.

A la suite de ce voyage, il est sujet à une profonde crise de dépression qui dure deux mois, dont la cause n’est pas clairement définie. Selon la correspondance du peintre à cette époque, elle est due à une relation avec la femme de chambre de l’épouse de son maître Vien, associé à une période de doute après la découverte des vestiges de Naples. Pour le sortir de cette crise de mélancolie, son maître lui fait avoir une commande pour un tableau à thème religieux commémorant l’épidémie de peste survenue à Marseille en 1720, Saint Roch intercédant auprès de la Vierge pour les malades de la peste destiné à la chapelle du Lazaret de Marseille (musée des beaux arts de Marseille). Même si l’on perçoit quelques résurgences du caravagisme, l’œuvre témoigne d’une nouvelle manière de peindre chez David, et s’inspire directement du style de Nicolas Poussin en reprenant la composition en diagonale de l’ Apparition de la vierge à saint Jacques le majeur (1629 musée du Louvre). Achevé en 1780 le tableau est présenté dans une salle du palais Mancini et produit une forte impression sur les visiteurs romains. Lors de son exposition à Paris en 1781, le philosophe Diderot est impressionné par la force d’expression du pestiféré au pied de Saint Roch.

Agrément par l’Académie et première exposition au Salon

Pompeo Batoni doyen des peintres italiens et un des précurseur du néoclassicisme, tenta sans succès de le convaincre de rester à Rome mais David quitte la capitale le 17 juillet 1780 en emportant avec lui trois œuvres, le Saint Roch, et deux toiles alors inachevées, Bélisaire demandant l’aumône et le Portrait équestre du comte Potocki. Jean Potocki est un gentilhomme et esthète polonais (il a traduit Winckelmann), que le peintre avait rencontré à Rome et qu’il représente en s’inspirant des portraits équestres d’ Antoon Van Dyck

Il arrive à Paris à la fin de l’année et termine son Bélisaire (musée des beaux arts de Lille) grand tableau destiné à l’agrément de l’artiste par l’Académie royale de peinture et de sculpture, seul moyen pour les artistes de l’époque d’obtenir ensuite le droit d’exposer au Salon de l’Académie. C’est après avoir vu le tableau sur le même sujet peint pour le cardinal de Bernis par Pierre Peyron ancien concurrent pour le prix de Rome, que David décide de réaliser lui aussi une toile sur le général romain déchu, tous les deux s’inspirent du roman de Marmontel. L’œuvre témoigne de sa nouvelle orientation picturale et de son affirmation du style néoclassique. Reçut à l’unanimité, il peut présenter ses trois peintures au Salon de 1781, ainsi que sa grande étude des Funerailles de Patrocle, où elles sont remarquées par la critique, en particulier Diderot qui avoue sa fascination pour le Bélisaire .

Il épouse en 1782 Marguerite Charlotte Pécoul, de dix-sept ans plus jeune que lui. Son beau-père, Charles-Pierre Pécoul, est entrepreneur des bâtiments du Roi, et dote généreusement sa fille, fournissant à David les moyens financiers pour installer son atelier au Louvre où il dispose aussi d’un logement. Elle lui donne quatre enfants, l’ainé Jules-Louis nait l’année suivante.

Il ouvre son atelier au Louvre où il reçoit les premières candidatures de la part de jeunes artistes désirant faire leurs apprentissages sous son enseignement. Wicar, Girodet, Drouais, Debret sont parmi les premiers élève de David.

Le Serment des Horaces procédait d’une commande officielle mais David ne s’est pas tenu au sujet demandé ni à la dimension souhaitée. Le tableau fut exposé au Salon de 1785 et le peintre déclara : J’ai abandonné de faire un tableau pour le Roi, je l’ai fait pour moi .

Présentant souvent des thèmes héroïque et patriotiques, ses tableaux reflètent alors l’humeur du temps et deviennent des modèles pour l’esprit d’héroïsme patriotique. Ils le seront encore pendant les deux décennies suivantes, et furent repris par ses disciples. Le Serment des Horace (1784) et la Mort de Socrate (1787) annonçaient l’esprit de sacrifice de la Révolution.

Mais il peint aussi des œuvres plus aimables comme « Les Amours de Pâris et d’Hélène » pour le comte d’Artois, futur Charles X, et le portrait d’Antoine-Laurent Lavoisier et de sa femme en 1788, où l’on voit le savant Lavoisier, grand commis de l’État, chargé de l’administration des poudres et explosifs, en compagnie de son épouse et collaboratrice qui a illustré son Traité élémentaire de chimie.

L’époque révolutionnaire

En 1789, il réalise pour le roi Les licteurs apportant à Brutus le corps de ses fils exécutés pour avoir trahi la République en tentant de rétablir la monarchie des Tarquin. Le consul Brutus est représenté à l’écart des femmes éplorées méditant dans la solitude. En 1790, il entreprit de commémorer le Serment du jeu de paume . Le Serment du jeu de paume était un projet onéreux, et David n’avait pas de commanditaire, mais il était soutenu par le Club des Jacobins dont il était membre. Il présenta son dessin au Salon, et finalement l’Assemblée, conquise par le nombre de personnages représentés, accepta d’en assumer les frais d’exécution, à la condition que l’artiste s’engage de reproduire fidèlement les portraits des personnalités représentées. Cependant le cours rapide des évènements, lors de cette époque révolutionnaire, rendit rapidement caduc ce projet que Marat qualifia de « pantalonnade » et il ne l’achèvera pas.

Son ardeur républicaine le fait en même temps s’impliquer politiquement dans les événements qui bouleversaient la France, et il fut élu député de la Convention nationale, en août 1792, quelques jours avant la prise des Tuileries par des émeutiers. Il siège avec le parti de la Montagne, aux côté de Robespierre. Fort de son nouveau pouvoir, il entreprend immédiatement une campagne pour la suppression de l’Académie.

Il vota en janvier 1793 (an I) pour la mort du Roi. Déjà membre du Comité d’instruction publique il fut nommé au Comité de sûreté générale, le 14 septembre 1793. À cette époque, il proposa l’établissement d’un inventaire de tous les trésors nationaux, faisant de lui l’un des fondateurs des musées en France et il joua un rôle actif dans l’organisation du Louvre, offrant un poste à Jean-Honoré Fragonard qui était démuni à cause de son style passé de mode.

De plus en plus engagé politiquement, il est aussi metteur en scène des cérémonies révolutionnaires comme celle du transfert des cendres de Voltaire au Panthéon de Paris. Il organise le rituel de la Fête de l’Être suprême dont Robespierre était le grand prêtre et dont des cérémonies furent organisées en l’honneur de Bara et de Viala, les enfants héroïques tués l’un par les Vendéens et l’autre par les insurgés royalistes du Midi de la France. Dans un tableau resté inachevé David fit figurer Bara nu, serrant la cocarde tricolore sur sa poitrine et se sacrifiant pour la patrie, tel un héros antique.

Après l’assassinat le 20 janvier 1793 du conventionnel régicide Louis-Michel Lepeletier de Saint-Fargeau, tué par un ancien garde du corps du roi, passé dans la Garde constitutionnelle du Roi, David avait pris l’initiative de réaliser un portrait de la victime sous le glaive fatal. Ce tableau, exposé à la Convention, puis récupéré par David en 1795, cessera d’être visible en 1826, mais nous reste connu par un dessin d’Anatole Desvoge, élève de David, et une gravure. Après l’assassinat de Marat le 13 juillet, la Convention, par la voix du député Guirault, commande à David de faire pour Marat ce qu’il avait fait pour Lepeletier. En octobre 1793, David prévient qu’il a terminé. À partir de novembre et jusqu’à la chute de Robespierre, les deux tableaux vont trôner de part et d’autre de la tribune de la Convention.

Marat assassiné (1793) expose dans sa crudité la réalité du crime, à la faveur d’une icône savamment calculée, vouée au culte du martyre révolutionnaire. En 1795, David récupère également ce tableau, qui cesse d’être visible jusqu’au XIXème siècle. Il est aujourd’hui détenu par les Musées royaux des Beaux-Arts de Bruxelles auxquels il fut offert par les héritiers de David. Parmi les autres œuvres de cette époque, figure également un croquis de la Reine Marie-Antoinette conduite à la guillotine.

En tant que membre du Comité de Sûreté Générale, David signa un grand nombre d’ordres d’arrestations qui menèrent certaines de leurs victimes à la guillotine, et participa comme témoin à l’interrogatoire du dauphin Louis XVII.

 

Pendant le Directoire

Après la chute de Robespierre, le 9 thermidor (27 juillet 1794), David fut compris dans la proscription. Mais absent de la convention ce jour-là, ayant été prévenu par un ami, il échappa de justesse à l’échafaud. Dénoncé par Lecointre comme robespierriste il fut mis en accusation et emprisonné à l’ancien Hôtel des Fermes générales, puis au Luxembourg. Ses étudiants se mobilisèrent et obtinrent sa libération le 8 nivôse an III (28 décembre 1794). Il sera à nouveau emprisonné en 1795 avant d’être amnistié.

Durant son emprisonnement, David ne reste pas inactif, il peint l’ Autoportrait du Louvre et conçoit Les Sabines. Ce tableau est une œuvre capitale de David, de style néo-classique, dans lequel il symbolise les rivalités fratricides des factions révolutionnaires et les vertus de la concorde. Les Sabines attira les critiques des Barbus, un groupe constitué de certains de ses élèves par Pierre-Maurice Quays qui prônait un retour au primitivisme. David dut se séparer de ces éléments perturbateurs.

C’est à cette époque qu’il reprend contact avec son ex-épouse Charlotte qui lui pardonne ses actes et qui accepte de l’épouser à nouveau

L’époque napoléonienne

Dès les premiers succès de Bonaparte en Italie, il fut séduit car il retrouvait en lui ses héros légendaires . Vers la fin de l’an VI (1797), sa rencontre avec le jeune général Bonaparte achève de le convaincre et il fait son premier portrait qui demeure inachevé. De l’an VIII (1799) à 1815, David lia son destin à sa gloire qu’il célébrera.

Il réalisa, pour le nouveau maître de la France puis de l’Europe, plusieurs tableaux à des fins de propagande et devint le peintre officiel du Premier Empire et fut couvert d’honneurs. Il réalisa des toiles de grande taille sur les événements majeurs du règne qui sont de nos jours présentées au musée du Louvre. Sa première représentation majeure fut Bonaparte au Grand-Saint-Bernard monté sur un cheval fougueux, alors qu’en réalité, en mai 1800, lors du passage du col, il montait un mulet, bête jugée plus sûre pour les sentiers de haute montagne. David dont c’était la première grande réalisation pour Bonaparte voulut en faire un tableau symbolisant le conquérant dans la ligne d’Hannibal avec le nom de Bonaparte gravé sur une pierre, en bas, à gauche du tableau. Originellement la toile fut commandée par le roi d’Espagne qui lui laissa le libre choix du sujet. Il existe quatre autres exemplaires de ce tableau qui furent exécutés par l’atelier de David. Cette œuvre majeure reproduite en France dans tous les manuels d’histoire depuis Jules Ferry est un des rares portraits équestres de Napoléon.

Le premier consul Bonaparte voulait nommer David « peintre du gouvernement » mais ce dernier refuse ce titre estimant mériter plus, et en 1804, le nouvel empereur l’investit dans la fonction de « premier peintre », fonction qu’avait occupé Charles Le Brun auprès du Roi Soleil. Ainsi à l’occasion des cérémonies du Couronnement, David reçoit commande de quatre tableaux dont il n’en exécutera que deux, « Le Sacre de Napoléon » et La Distribution des Aigles, à cause de difficultés de paiement.

Il réalisa Le Sacre de Napoléon en trois ans et disposa pour ce faire d’une loge à Notre-Dame d’où il put suivre, les épisodes et les détails de la grandiose cérémonie. Il a relaté lui-même comment il opéra : « J’y dessinai l’ensemble d’après nature, et je fis séparément tous les groupes principaux. Je fis des notes pour ce que je n’eus pas le temps de dessiner, ainsi on peut croire, en voyant le tableau, avoir assisté à la cérémonie. Chacun occupe la place qui lui convient, il est revêtu des habillements de sa dignité. On s’empressa de venir se faire peindre dans ce tableau, qui contient plus de deux cents figures… ». Cependant, le tableau n’est pas tout à fait véridique sur au moins deux points : la mère de Napoléon représentée dans la tribune la plus proche de l’autel, selon le vœu de l’empereur, n’assista pas à la cérémonie, et le pape Pie VII, représenté bénissant le mariage, n’a été en réalité que simple spectateur, restant toute la cérémonie assis dans une attitude résignée.

Dans le tableau La Distribution des Aigles il dut sur ordre de l’empereur réaliser deux modifications importantes : il vida le ciel de la « Victoire qui jette des lauriers aux officiers brandissant drapeaux et étendards » et après 1809 il fit disparaître de la scène Joséphine répudiée. La première modification rendit sans objet le mouvement de tête des maréchaux regardant désormais le vide à l’emplacement où se trouvait l’allégorie.

Vers la fin de l’Empire, les commandes officielles se raréfient et David achève son tableau Léonidas aux Thermopyles un épisode de l’histoire de l’Antiquité grecque qui va devenir à la mode. Ce tableau fut conçu par David vers 1800, époque où la glorification des vertus héroïques du sacrifice pour la nation était un modèle à suivre. Le Roi Léonidas à la tête de trois cents guerriers résolus, tient tête à plusieurs centaines de milliers de soldats perses, donnant aux Grecs le temps de se reprendre. Le tableau fut achevé en mai 1814, alors que Napoléon venait d’abdiquer et de s’exiler sur l’île d’Elbe. Lors des Cent-Jours, Napoléon de passage à Paris prit le temps d’aller voir le tableau, comme un suprême hommage au génie de David. Le peintre conserva sa fidélité à l’Empereur en signant l’ « Acte additionnel ».

Après la bataille de Waterloo, et le retour du roi Louis XVIII sur le trône, David, pour avoir signé l’ « Acte additionnel », est définitivement proscrit du royaume de France et doit partir en exil, après la loi du 12 janvier 1816.

L’exil à Bruxelles

Dans un premier temps, il sollicite l’asile auprès de l’Italie qui le lui refuse. La Belgique plus libérale le reçoit et il retrouve à Bruxelles d’autres Français qui partagent la même infortune : Barrère, Pierre Joseph Cambon, Merlin de Douai, Thibaudeau, Alquier et Sieyès.

Il exécute de nombreux portraits de la haute société bruxelloise pour vivre, mais ses capacités sont encore là, il n’a pas renoncé à la « grande manière » et reprend ses sujets liés à la mythologie grecque et romaine.

Refusant les généreuses interventions tendant à obtenir son retour en France, il restera en Belgique jusqu’à sa mort neuf ans plus tard malgré une amnistie. Dans ce pays, il a enfin trouvé la quiétude et, presque octogénaire, il exécute sans commanditaire en 1824, un tableau de plus de trois mètres de haut, « Mars désarmé par Vénus et la Grâce », œuvre d’une grande grâce, d’une grande liberté et d’une fraîcheur d’âme qui annonce l’éclosion du romantisme et la redécouverte de l’Antiquité. Ce fut sa dernière grande œuvre et David mourut l’année suivante, en 1825.

Les anecdotes sur Jacques-Louis David

Propagande Napoléonnienne
En 1801, il signe ‘Bonaparte franchissant le mont St Bernard’ qui immortalise le général en conquérant sur un beau cheval aux allures romantiques. La vérité historique est tout autre puisque le mont fut franchit à dos de mulet. La légende de l’Empereur est en marche.

Le peintre révolutionnaire
En 1793, il obtient la suppression de l’Académie de peinture, il réorganise l’enseignement et les institutions artistiques sur des bases libérales, il s’occupe des musées, des monuments, du théâtre, de l’urbanisme, des uniformes, des sabres et des rideaux de l’Opéra.

Les citations

« Il faut que l’artiste soit philosophe »
Jacques-Louis David

La bibliographie de Jacques-Louis David

David : l’Art et le Politique
de Régis Michel, Marie-Catherine Sahut
[Histoire et Actualité]
Résumé du livre
Jacques-Louis David était le peintre officiel de la Révolution et un membre de la Convention au plus fort de la Terreur. Il a toujours mis son art aux services de ses idéaux à travers les fêtes révolutionnaires, ou la propagande. Homme dangereux car manipulateur de l’art au service d’une cause, ce livre décrit les liens du peintre avec le domaine politique, la modernité de son action face à l’Histoire.

 

 

Les livres à propos de Jacques-Louis David

David
d’Arlette Sérullaz et Louis-Antoine Prat
[Beaux-Arts]
Résumé du livre

L’oeuvre de Jacques-Louis David constitue sans doute, avec celles de Nicolas Poussin et de Paul Cézanne, l’un des trois grands tournants dans l’évolution de l’art français. Homme des Lumières, mais aussi nourri des exemples moraux de la littérature antique, il a su infléchir le cours de l’école picturale de son temps, et symbolise mieux que tout autre ce que fut cette forme de ‘retour à l’ordre’ que représente le néo-classicisme français. L’usage du dessin fut déterminant dans cette évolution ; devant le spectacle des ruines antiques révélées lors de ses deux séjours romains, David n’a cessé de dessiner, tout en inventant un style graphique original, fait de rigueur et d’acuité. C’est avec cette même exigence qu’il préparera par le dessin ses grandes compositions d’avant la Révolution (‘Le serment des Horaces’, ‘le Brutus’) comme, plus tard, les immenses scénographies dédiées à la geste de Napoléon.

Les critiques

par Mikaël Demets
Ce petit ouvrage se veut être plus qu’un assortiment de dessins du célèbre David, il tente également, et explicitement, de redonner aux dessins du maître ses lettres de noblesse, une réhabilitation. David n’a jamais été admiré pour ses dessins, alors qu’on apprend qu’il en faisait une priorité, qu’il les avait pour passion. Après un article sur l’approche qu’avait David du dessin et l’historique de la récupération de ses oeuvres par le Louvre, une courte biographie nous resitue l’auteur de ces traits. Puis s’enchaînent les cinquante dessins, qui bénéficient de quelques éclaircissements personnalisés en fin d’ouvrage. On retrouve les thèmes de prédilection de David : Antiquité, mythes homériques, ville de Rome, actualité (Révolution, Bonaparte). Toujours traités dans un style classique très vivant, associé à une touche de romantisme. Cinquante oeuvres, il faut l’admettre, inégales, puisque sont mélangés esquisses préparatoires, griffonnages d’idées et véritables dessins achevés. Du coup, ce livre n’est pas toujours "beau" à proprement parler, et il n’attirera peut-être pas tout le monde. Par contre, il est réellement utile lorsqu’il nous fait découvrir la gestation d’oeuvres devenues des références. Le dessin du ‘Serment du jeu de paume’ est superbe de précision et de passion, et les esquisses qui montrent la réflexion de l’artiste à propos de son ‘Sacre de Napoléon’ sont très intéressantes. L’outil idéal pour découvrir le travail du célèbre peintre par un autre point de vue.

Entre lumières et romantisme
Sous la direction de Mehdi Korchane
[Beaux-Arts]
Résumé du livre
La scène artistique européenne voit s’épanouir entre 1760 et 1820 le courant néoclassique. Aux bouleversements qui affectent l’échiquier politique répondent des mutations esthétiques profondes, marquées par des dualités et des contradictions : Rome et Paris, antiquité et modernité, nature et idéal, classicisme et romantisme. Le cabinet des dessins des Beaux-Arts d’Orléans abrite une collection de plusieurs centaines de pièces où sont représentés tous les grands artistes français de la période (David, Géricault, Ingres, Regnault… ) ainsi que des artistes étrangers rares dans les collections publiques françaises tels Mengs, hackert, Gessner, Kuyper. Un ensemble exceptionnel dont cet ouvrage tente de révéler toute la richesse.

Henriette de Verninac

[Arts – Peinture & Arts graphiques]
Lieu : Musée Eugène Delacroix – Paris
Présentation
En 1799, Jacques-Louis David peint le portrait d’Henriette de Verninac, soeur d’Eugène Delacroix, alors âgé de un an. A la mort de cette dernière, le tableau devint la propriété de Delacroix qui le garda jusqu’à sa mort en 1863. Centrée sur le Portrait d’Henriette de Verninac, qui est présenté exceptionnellement à cette occasion, l’exposition évoque, à travers une sélection d’oeuvres graphiques et de documents (certains inédits) concernant Delacroix ainsi que les Verninac, les relations que l’artiste entretint avec sa soeur et son neveu, Charles de Verninac, dont il était l’aîné de cinq ans seulement.

Poussin, Watteau, Chardin, David…
[Arts – Peinture & Arts graphiques]
Lieu : Galeries Nationales du Grand Palais – Paris
Présentation
En 1982 déjà, une exposition regroupant les plus beaux tableaux français du XVIIe siècle conservés dans les collections publiques des Etats-Unis était présentée au Grand Palais. Le même principe a été retenu pour la présente exposition. 168 peintures françaises des XVIIe et XVIIIe siècles conservées dans les musées d’Outre-Rhin ont donc été réunies. Les oeuvres présentées sont pour la plupart regroupées par genre : la peinture religieuse et mythologique, les portraits, la peinture de paysage, la nature morte… Une section est consacrée aux esquisses à l’huile et une autre section composée uniquement de tableaux de Nicolas Poussin et de Claude Lorrain. D’autres maîtres français sont également très bien représentés dans l’exposition : Simon Vouet, Valentin, Largillierre, Watteau, Chardin, Boucher, Greuze… Cette exposition placée sous le haut patronage de Monsieur Jacques Chirac, Président de la République. A cette occasion, l’inventaire complet des oeuvres françaises des XVIIe et XVIIIe siècles conservées dans les collections publiques allemandes sera publié en Allemagne.

La critique
par Eva Jankovic

C’est un travail conséquent et passionnant que M. Rosenberg a accompli ces dernières années. Un travail d’utilité publique pour la promotion de la culture, de la peinture française du XVIIe et XVIIIe, siècles trop méconnus par notre jeunesse. Il est allé de ville en ville en Allemagne, il a visité les Musées et a recherché toutes les peintures françaises acquises peu à peu par les Allemands. Ces derniers n’ont jamais refusé un prêt sauf quand les oeuvres étaient trop fragiles. Donc, grâce à la patience et la passion de M. Rosenberg, le Grand Palais nous propose un très large panorama de la peinture française de ces siècles. Poussin bien sûr (et son autoportrait de 1649 ressemblant à celui du Louvre de 1650), le fort connu Le Brun peintre de Louis XIV, Chardin, Bourdon, Jouvenet, Boucher (‘L’Odalisque blonde’ ou les grands paysages de fantaisies), Oudry, Nattier, la liste est immense… L’exposition est divisée en genres : la peinture maniériste, la peinture de portraits, les natures mortes, les paysages ou les batailles, les scènes champêtres de Watteau, les scènes mythologiques ou d’histoire, les peintures galantes et libertines très à la mode au XVIIIe. Fragonard nous surprend avec sa liberté son audace et sa légèreté. L’avantage d’une exposition d’une telle ampleur, c’est qu’elle permet de combler tous les goûts.

Jacques Louis David Autoportrait (1794) musée du Louvre

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